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Sunday, January 7, 2024

1924 : la revendication de l'autonomie portée par a Muvra alors que l'île est frappée de stagnation économique - Corse Matin

En ce début d'année 1924, deux ans à peine après la visite en Corse du président de la République Alexandre Millerand, qui soulevait l'enthousiasme en parlant publiquement « d'une sorte d'autonomie administrative pour la Corse », la situation économique et sociale de l'île reste précaire. Le Partitu d'azione corsu, plaidant pour la réouverture de l'université, rebondit sur le mot « autonomie » qu'il espère porteur d'un relèvement pour la Corse, écrivant dans A Muvra l'hebdomadaire créé en 1920 par Petru Rocca : « Est-il besoin d'ajouter que cette université corse, que ce bilinguisme officiellement reconnu, que cette large autonomie administrative que nous demandons et qui nous ont été si souvent promis par des hommes d'État autorisés, ne nous empêcheraient en aucune façon d'être des citoyens français d'un loyalisme inattaquable. »

Ainsi, quelques mois après la marche sur Rome de Mussolini, les tenants du mouvement régionaliste entendent-ils clarifier leurs intentions véritables, alors même que leur démarche est interprétée par les irrédentistes italiens comme un vœu de s'éloigner de la France pour rejoindre un jour l'Italie. « Le cri ''autonomia'' lancé en 1924 par Xavier Versini est repris par Petru Rocca et les Muvristes, mais il ne rencontrera point un profond écho. Bientôt l'hydre irrédentiste lance ses premiers tentacules en direction de l'île, sans plus de succès. » (1)

Aux législatives de mai 1924, alors que le Partitu d'azione corsu prêche l'abstention, la Corse envoie à l'Assemblée quatre députés, Antoine Gavini, François Pietri, Adolphe Landry et Vincent de Moro Giafferi. Dans leurs dossiers, deux sujets majeurs, les relations maritimes entre la Corse et le continent, et le banditisme. Mises à mal par la guerre sous-marine durant le conflit de 1914-18, les Messageries maritimes retrouvent un second souffle grâce aux aides de l'État, et la Corse espère relancer le trafic maritime. Henri Pierangeli tire la sonnette d'alarme dans les colonnes de Bastia Journal : « Il faut absolument que l'on crée des services rapides de voyageurs entre la Corse et le continent, c'est là une idée qui sera défendue devant le Parlement. »

En 1924, l'amélioration des rotations maritimes avec la Corse suppose la modernisation des navires et des ports. Celui de Bastia datant du Second Empire n'est pas « plus grand que le bassin de Versailles », écrivait Blanqui. Pour faire face à la poussée du trafic, un nouveau projet vise à prolonger le môle génois du Vieux port et la jetée Saint-Nicolas, de façon à aménager un grand port qui réunisse l'ancien et le nouveau. « Mais ce projet qui à première vue avait paru séduire les Ponts et Chaussées, aurait coûté huit millions, semblant hors de proportion avec notre trafic maritime. »

Levée de boucliers contre un dépôt d'essence à Bastia

Par ailleurs, le projet d'installer un dépôt d'essence de 3 500 tonnes sur les quais du Nouveau port, suscite un tollé chez les riverains du quartier de Toga qui lancent un cri d'alarme. La population n'entend pas les arguments avancés au plus haut niveau comme la Défense nationale ou l'approvisionnement de l'industrie. Trois pétitions sont adressées aux ministères concernés, Commerce, Intérieur, et Travaux publics.

Les navires assurent désormais des liaisons triangulaires. Le Général Bonaparte effectue le trajet Marseille-Bastia-Nice. Le Liamone la traversée Marseille-Bastia-Nice ou Livourne, l'Iberia Nice-Toulon-Balagne, et le Corte II, Marseille-Ajaccio-Nice. Une desserte aérienne s'organise avec des hydravions reliant Antibes à Ajaccio. Une ligne d'autocars de 15 places met désormais Bastia à six heures d'Ajaccio.

Le 16 novembre, le sénateur-maire Émile Sari pose la première pierre de l'hôpital de Bastia, geste initié en 1869 par l'impératrice Eugénie lors de son voyage en Corse. Jamais abandonné, le projet avait été mis en jachère par la chute du Second Empire et la Grande Guerre.

Malgré le talent des défenseurs de la Corse au Palais-Bourbon dont l'avocat Moro-Giafferi, et son cri d'alarme lancé au président Millerand - « vous venez visiter une île qui meurt » - l'économie stagne. « Malgré les projets et les revendications, la situation économique de l'île poursuit l'évolution engagée depuis longtemps : rien de nouveau n'a été fait pour assainir les plaines côtières vidées par le paludisme, et l'effondrement de l'agriculture se poursuit. » (2)

(1) Mémorial des Corses. (2) J-M Arrighi et O. Jehasse. Histoire de la Corse et des Corses.

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