« Jonas, Jonas ! » Il est 17h20 et un journaliste néerlandais interpelle le premier des Jumbo Visma à en terminer avec le calvaire d’Arenberg. Jonas Vingegaard, le visage noirci de poussière et de souffrance, est à peine reconnaissable. Il lève brusquement un œil, comme si on le réveillait d’un cauchemar, et monte dans le bus sans un mot.
Le contraste est saisissant. Depuis le début du Tour, à peine la ligne d’arrivée franchie que le prodige danois montait sur sa monture de décrassage avec un enthousiasme désarmant. Un remerciement ici à son directeur sportif, un bon mot là-bas pour son fan-club de l’autre côté des barrières. Il est 17h20, ce mercredi jour de 5e étape, et le jaune a laissé place au noir chez les abeilles de la Jumbo.
Alors certes, Wout Van Aert portera ce jeudi son maillot jaune pour un quatrième jour à son grand étonnement. Certes, le jeune Vingegaard n’a finalement lâché que treize secondes à Pogacar, étincelant de facilité sur les pavés. Mais difficile de penser à ces bouts d’éclaircie tant le ciel s’est assombri dans le Nord sans crier gare.
La « panique » de Vingegaard, l’épaule disloquée de Roglic
Le festival de malchance a débuté à 96 km de l’arrivée, avant l’entrée dans la première des onze difficultés du jour. Wout Van Aert chute dans un virage. On le pense remis mais, dix minutes plus tard, nouvelle frayeur, une imprudence manque de l’envoyer dans l’arrière d’une voiture de directeur sportif. Les soucis du très nerveux Maillot jaune ne sont rien à côté de ceux qui attendent une heure plus tard le duo qu’il est censé protéger.
16h27, la chaîne de Jonas Vingegaard se coince. La crise de « panique », comme il l’a concédé, peut commencer. Le dauphin de l’édition 2021 change trois fois de vélo en moins d’un kilomètre, la selle des deux premiers engins empruntés à ses collègues étant trop haute.
Le voyage au bout de l’enfer connaît son climax huit minutes plus tard. Au tour de Primoz Roglic de toucher terre. L’impact est aussi traumatique que spectaculaire. Contraint de se remettre lui-même l’épaule en place, en empruntant le siège d’un spectateur, le voilà maintenant relégué à plus de deux minutes et trente secondes de son compatriote et rival slovène.
« On va bien voir comment je peux continuer »
Son abandon l’été dernier après seulement huit étapes trotte dans tous les esprits. « On va bien voir comment je peux continuer », a-t-il simplement dit, avant de rejoindre les siens la fesse gauche ensanglantée. Au même moment, devant le car, ses coéquipiers tentaient toujours de s’expliquer l’inexplicable entre deux tapes sur l’épaule.
« On a reconnu l’étape quatre fois mais cela ne sert rien quand la chance n’est pas avec vous », devise le directeur sportif Grischa Niermann. « C’est un résultat de merde, abonde Vingegaard. On a perdu du temps. Mais on ne peut rien n’y faire. Je reste confiant dans ma forme et dans ce qu’on est capable de faire dans la montagne. »
Wout Van Aert a le sens de la formule et de la synthèse. « On s’est battu à l’arrière alors qu’on comptait se battre à l’avant », lâche celui qui a tout de même levé un gros doute dans tout ce malheur. C’est maintenant certain, le Maillot jaune saura se muer en super-équipier lorsque la course l’imposera. C’est lui qui a emmené Vingegaard et le peloton comme un grand dans son sillage pour limiter la casse. D’un coup, la hiérarchie s’est clarifiée chez les Jumbo. Malheureusement, pas de la manière et dans le timing souhaités.
Tour de France : «On s’est battu à l’arrière alors qu’on comptait se battre à l’avant», la sale journée des Jumbo - Le Parisien
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