L’administration a parfois ses raisons que la raison ignore. Pour s’en convaincre, gros plan sur la situation kafkaïenne que vivent Martin – 11 ans – et Laure, sa maman qui l’élève seule.
"J'étais très en colère"
Tous deux habitent à Muret, une commune de Haute-Garonne. Un collège public se trouve à 5 minutes à pied de leur domicile. Aussi, alors que Martin s’apprêtait à boucler son année de CM2, lui et sa maman se projetaient logiquement vers une rentrée dans l’établissement au pied de chez eux.
Mais la logique n’est visiblement pas le critère principal sur lequel repose une carte scolaire... Laure a découvert que son fils ne ferait pas sa rentrée dans le collège le plus proche de chez lui, l’Éducation nationale l’a en effet affecté dans un établissement de Frouzins (Haute-Garonne) qu’il devra rallier via un trajet de 50 minutes en bus.
"Au départ, j'étais très en colère, car c'est une façon de mettre des bâtons dans les roues supplémentaires dans l'organisation des parents isolés, confie la maman à nos confrères de France 3 Occitanie. J'étais aussi en colère car j'avais déjà préparé mon fils psychologiquement à sa nouvelle vie au collège près de chez nous, qu'il aurait sa clé pour rentrer etc... Maintenant, j'ai laissé tomber la colère, je me suis ravisée sans me résigner. Cette colère n'était pas bonne pour que mon fils puisse faire une rentrée sereine."
Dérogations refusées
L’affectation de Martin dans un collège loin de chez lui ne résulte pas d'un "bug" mais bien d'un choix assumé par les services de l’Éducation nationale qui se retranchent derrière les critères obscurs et abscons de la carte scolaire. Du reste, les deux demandes de dérogation formulées par Laure lui ont été refusées.
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"Le Directeur académique des services de l’Éducation nationale de la Haute-Garonne affecte bien les élèves mais en se conformant strictement à la carte scolaire élaborée par le conseil départemental. Chaque secteur est couvert par un transport scolaire", se borne à expliquer le rectorat de l’Académie de Toulouse.
Qu'est-ce que la carte scolaire ?
Le site internet de l'Éducation nationale définit la carte scolaire comme un système qui "permet l’affectation d'un élève dans un collège ou un lycée général ou technologique correspondant à son lieu de résidence (sic). Toutefois, chaque famille a la possibilité de formuler une demande de dérogation afin que son enfant soit scolarisé dans un établissement de son choix".
La carte scolaire repose en grande partie sur un découpage géographique des départements. En fonction de leur lieu de résidence, les familles se voient affecter d'autorité un établissement scolaire pour leur(s) enfant(s).
"Certaines personnes m'ont conseillé de mentir"
Pour parvenir à ses fins, Laure aurait pu "tricher" comme certains parents le font parfois, mais elle s’y refuse. "On m'a expliqué que si Martin était porteur d'un handicap, on pourrait l'intégrer de suite, car les élèves concernés, le cas échéant, sont prioritaires. Certaines personnes m'ont conseillé de bluffer, de mentir, d'inventer des choses qui n'étaient pas pour que mon fils n'aie pas besoin de faire 50 minutes tous les matins et tous les soirs pour aller au collège. J'élève seule mon enfant, je travaille à 50 minutes de chez nous, mon fils est suivi médicalement régulièrement, ça n'a apparemment pas compté."
"Je trouve ça scandaleux"
Ancienne documentaliste dans l’Éducation nationale - et aujourd’hui à la retraite -, Marie, la grand-mère du jeune homme ne cache pas son exaspération. "La carte scolaire pose question. Je ne comprends pas cette situation. Mon petit-fils n'aurait qu'à traverser l'avenue d'où il vit. (...) L'inspection académique et le rectorat font la pluie et le beau temps avec la vie des gens. lls coupent, tranchent, dessinent, mais la vie des gens ce n'est pas dessiner des cercles sur une carte pour étaler "la mixité sociale". (...) Je trouve ça scandaleux", s’emporte-t-elle.
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