On l'appelle une tire, une caisse ou un vago, selon les époques. Depuis qu'elle existe, l'automobile a été affligée de qualificatifs argotiques sympas ou beaucoup moins. Et son usage a également donné lieu à quelques expressions fleuries. Petit florilège.
Certes, l'argot a été inventé avant la voiture. Et de François Villon, à Rabelais en passant par les bouchers du XIXe siècle, les poètes, les écrivains et les différents corps de métiers ont toujours truffé leur langage, et leurs écrits, de mots fleuris, ou d'un langage qui leur était propre comme le louchebem pour les détaillants en viande persillée. Du coup, l'automobile, en trimballant son lot de fascination, de symboles, de passion exacerbée, voir de haine parfois, a eu droit, dès sa naissance, à un baptême en règle, en changeant de nom au gré des époques et des groupes sociaux.
"J'ai plus de calèches perso, je prends des ronfleurs"
Au départ, la voiture a bien entendu hérité des noms du temps d'avant elle. Elle est devenue charrette, calèche, fiacre, et même caisse, un nom qui, comme les précédents se référait aux voitures à cheval. Très vite, le taxi est apparu, aussitôt rebaptisé ronfleur, à cause des premiers compteurs mécaniques qui ronflaient comme un gros réveil remonté à clé.
Avec la naissance de la voiture est né son corollaire : la panne. Et du coup, l'auto en a pris pour son grade, devenant la bagnole, un mot dérivé de la banne, désignant une charrette de mauvaise qualité en Normandie. Elle est toute aussi rapidement devenue la poubelle, chez ses proprios vraiment vénères contre elle. Plus sympathique, la tire, née dans les années trente, a été popularisée par l'inusable Frédéric Dard et par le chanteur Renaud qui lui a consacré un morceau à la fin des années 70 : "dans la tire à Dédé, j'en ai fait des virées, quand j'y r'pense aujourd'hui, sur ma mob je m'ennuie". Plus récemment, un terme venu de l'argot gitan s'est imposé, sans qu'on en connaisse vraiment son étymologie. Le vago a remplacé la seucai (verlan de caisse) franchissant très largement les limites des banlieues. Mais si certains noms sont plutôt à consonance péjorative, d'autres sont plutôt flatteurs, comme la pompe à feu qui désigne une auto puissante.
Pour autant, si l'argot s'est longuement attardé sur la dénomination même de la voiture, il n'a pas épargné ses pièces, en commençant par le moteur. De brûleur, il est devenu moulin. Quant aux chevaux qui l'animent, ce sont logiquement des bourrins, comme le volant s'est tout aussi logiquement transformé en cerceau. Les pneus eux-mêmes ont été rebaptisés et sont devenus gommards.
"Accroche-toi au cerceau et soude"
La manière de conduire est elle aussi passée au moulinet argotique. En voiture, on astique, on avoine et on soude. Ce dernier terme provient de l'écrasement de la pédale d'accélérateur que l'on "soude" au plancher de l'auto. En soudant, on risque évidemment de croiser un barbecue, le terme qui désigne un radar, puisque les anciens modèles de détecteurs de vitesse, les trop fameux Mesta 206, ressemblaient quelque peu aux engins qui prennent soin de nos grillades estivales.
Avec l'avènement de la voiture électrique, tous ces mots fleuris vont-ils disparaître ? Possible, mais pas sans être remplacés par d'autres. Et l'affaire est bien engagée. Les autos à watts ont déjà leur petit nom. Elles sont parfois traitées de machine à laver, voir de Dyson, du nom de la marque anglaise, spécialiste de l'aspirateur haut de gamme. Si l'auto n'en finit pas d'innover, le langage qui l'entoure n'est jamais en reste.
Route de nuit - alors, tu soudes avec ton vago ? - Caradisiac.com
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