Malgré le recul du cash dans les transactions du quotidien, le montant des billets en euro en circulation n'a fait que progresser ces dernières années. Un paradoxe que tente d'expliquer la Banque centrale européenne dans une nouvelle étude.
C’est ce que l’on appelle le "paradoxe des billets". Dans une étude publiée lundi, la Banque centrale européenne (BCE) s’interroge sur un phénomène particulièrement mystérieux. Alors que l’utilisation de l’argent liquide ne cesse de diminuer au profit des paiements par carte, la demande de billets émis par l’institution de Francfort n’a fait que progresser ces dernières années.
Certes, le cash représente encore aujourd’hui 72% des transactions en volume (47% en valeur) au sein de la zone euro, selon la BCE. Mais cette proportion a baissé de 6 points en seulement trois ans. Dans le même temps, la valeur des billets en euro en circulation s’élevait à 1435 milliards d’euros en 2020, en hausse de 11% par rapport à 2019! Et cette masse monétaire a même augmenté de 5% en moyenne par an au cours des dix dernières années.
20% de la valeur total pour les transactions
Dès lors, la question que se pose la BCE est la suivante: s’ils sont moins utilisés pour les achats du quotidien, où se trouvent tous ces billets? Résoudre cette équation relève toutefois d’un exercice périlleux, reconnaît l’institution qui rappelle que "l’argent liquide est utilisé de manière anonyme" et que les résultats de ses travaux doivent dès lors être "considérés avec la prudence appropriée".
Ces précautions prises en compte, les conclusions de l’étude n’en restent pas moins riches d’enseignements. D’abord, la BCE estime que les transactions représentaient environ 20% de la valeur totale des billets en circulation en 2019. Soit près de 260 milliards d’euros sur 1293 milliards. Reste donc à retrouver la trace des 80% restants.
Toujours selon les économistes de la BCE, entre 30 et 50% de la valeur des billets en euro était détenue à l’étranger en 2019. Essentiellement dans "des pays en développement ou en transition" qui considèrent l’euro, au même titre que le dollar, comme une "devise forte".
Réserves
Enfin, entre 27,5 et 50% de la valeur des billets en circulation seraient stockés au sein même de la zone euro. Il s’agit d’argent thésaurisé, ou, plus trivialement, mis bien au chaud sous le matelas. Cela signifierait que chaque citoyen adulte de la zone euro détiendrait "entre 1270 et 2310 euros" de réserves en liquide.
Il faut toutefois noter que ces réserves incluent également celles des entreprises et des banques. La BCE souligne d’ailleurs que les liquidités conservées dans les coffres-forts des institutions financières à des fins de stockage de valeur a augmenté de 60% entre 2014 et 2019, pour atteindre 90 milliards d’euros.
Et pour cause, l’année 2014 a été marquée par le passage en territoire négatif du taux de facilité de dépôts. De sorte que les banques ont considéré qu’il était moins coûteux de détenir des réserves de cash dans les coffres plutôt que de les déposer auprès de la banque centrale.
>> Un phénomène courant en temps de crise
L’augmentation des espèces en circulation observée en 2020 n’a finalement rien d’anormal. "Au cours des différents types de crises, les gens ont tendance à demander de plus en plus de liquidités, et la crise du Covid-19 n’a pas fait exception", relève la BCE. L’institution rappelle ainsi que le même phénomène s’était produit lors de la bulle technologique de l’an 2000, de la crise financière de 2008 ou encore lors de catastrophes naturelles comme les tremblements de terre ou les ouragans.
Pourquoi le nombre de billets en circulation ne cesse d’augmenter alors que leur utilisation diminue - BFMTV
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